La dégringolade du secteur de la santé au Burundi : les aspirations des jeunes en péril
Dans un pays où le rêve de faire carrière dans le secteur médical était autrefois une lueur d'espoir pour de nombreux jeunes, la réalité actuelle est bien plus sombre.
Selon une étude du Centre national d'Alerte et de Prévention des Conflits, en 2017,la majorité des jeunes (30,6% des jeunes Burundais âgés de 15 à 29 ans) souhaitaient embrasser une carrière dans le domaine de la santé. Ce chiffre était largement supérieur à ceux des secteurs bancaires (10,9%) et entrepreneurial (10,7%). Aujourd'hui, cette ambition semble être en train de s'éteindre.
Un état des lieux alarmant
Malgré les bonnes intentions affichées lors de la présentation des résultats de l'étude aux autorités, la dégradation du secteur médical a pris des proportions inquiétantes. En janvier 2024, la ministre de la Santé publique a reconnu, devant les sénateurs, un exode massif de médecins, affirmant que le problème persistera tant que les questions salariales ne seront pas résolues. Depuis 2020 jusqu'à janvier 2024, un média local annonçait que plus de 30 médecins spécialistes ont quitté le pays. Le phénomène se poursuit jusqu'à ce jour avec des exemples frappants comme les 16 médecins de la province de Kayanza qui ont abandonné leur poste dans les six derniers mois.
Des rêves écrasés
Les jeunes qui rêvaient d'exercer en tant que médecins, infirmiers ou sages-femmes se retrouvent désormais face à une désillusion profonde. Loin de servir leur pays comme ils l'avaient imaginé, beaucoup cherchent à fuir vers des contrées où leurs compétences sont reconnues et rémunérées à leur juste valeur. Ce changement d'aspiration est tragique, car la motivation principale des jeunes en 2017 était de soigner les malades et de bénéficier d'un emploi stable.
Conditions de travail indignes
Pour ceux qui réussissent à intégrer le secteur, les conditions de travail sont souvent déplorables. Les hôpitaux publics et privés peinent à recruter, et les jeunes diplômés sont souvent contraints d'accepter des emplois précaires, où le favoritisme et la corruption sont monnaie courante. Dans certains cas, pour espérer un poste, il est nécessaire d'adhérer au parti au pouvoir ou de verser des pots-de-vin. De plus, de nombreux jeunes infirmiers et sages-femmes se retrouvent exploités en tant que stagiaires non rémunérés pendant des mois, voire des années.
Le CREDEJ (Centre pour le Renforcement de l'Éducation et du Développement de la Jeunesse) exhorte le gouvernement du Burundi à restaurer l'image du secteur médical. Il est impératif que l'État prenne en compte les aspirations de ses jeunes et mette en place des mesures concrètes pour améliorer les conditions de travail et la rémunération des professionnels de santé. Si des actions ne sont pas entreprises rapidement, il est à craindre que le secteur médical perde tout attrait pour les nouvelles générations, laissant ainsi un vide béant dans l'avenir du pays.